On n’a pas encore trouvé le moyen de sauver les abeilles (Ni de nous sauver nous-même, tant les abeilles nous sont utiles), mais il y a de plus en plus de spécialistes qui cherchent…
Pour preuve, cet article de Christel de Taddeo relevé dans le Journal du Dimanche du 1er décembre 2013 :
Indispensables à l’homme, ces insectes pollinisateurs sont à la base de notre alimentation. Or on constate ces dernières années une mortalité très élevée des colonies, dont l’origine est l’objet de nombreuses recherches
Des reines qui meurent « à petit feu »
Si les abeilles disparaissaient de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quatre années à vivre, estiment certains apiculteurs. En Europe, plus de 200 travaux de recherches s’intéressent à la santé de ces insectes. Une grande enquête de surveillance européenne (Epilobee), diligentée par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) à Sophia Antipolis (Alpes- Maritimes), va notamment permettre d’obtenir des données essentielles sur leur mortalité. Les premiers résultats seront rendus en mars prochain. « Si on remet en place cet outil de surveillance d’année en année, on aura un indicateur pertinent », indique Yves Le Conte, directeur de recherche à l’Inra, qui préside un groupe de travail sur la mortalité des abeilles. Depuis une trentaine d’années, les scientifiques constatent un taux de mortalité anormalement élevé des colonies, notamment après l’hivernage. Un phénomène observé principalement en Europe et en Amérique du Nord. En France, à cette période, entre 20 et 30 % des colonies disparaissent selon les années. Des chiffres «problématiques », relève Yves Le Conte. Autre inquiétude : la qualité des reines, qui devraient vivre entre trois et cinq ans. Les apiculteurs ne les conservent qu’un an, deux ans maximum, voire même seulement six mois. « Elles ne sont pas forcément soumises au même stress que les butineuses, directement au contact des pesticides. Mais une reine, dans la colonie, va rester en contact pendant des mois avec des résidus d’insecticides et des pathogènes qui vont la tuer à petit feu », explique Yves Le Conte.
Les facteurs de stress sont multiples
Depuis une quinzaine d’années, les scientifiques qui travaillent sur les différentes causes de mortalité des abeilles ne sont pas parvenus à isoler un facteur pouvant expliquer à lui seul leur déclin. Il a beaucoup été question des néonicotinoïdes, une classe d’insecticides parmi les plus utilisés à travers le monde depuis une vingtaine d’années et qui agit sur le système nerveux central des insectes, provoquant la paralysie et la mort ; du varroa, un acarien passé de l’abeille d’Asie à notre abeille européenne au début des années 1980; du frelon asiatique, qui s’est introduit en France fin 2004 dans des poteries venues de Chine et serait désormais présent dans une soixantaine de départements. Cependant, la plupart des agents pathogènes identifiés par les chercheurs (intoxication chimique, prédateurs, pathologies, parasites, bactéries, champignons, virus) existaient bien avant qu’un « syndrome d’effondrement » des colonies ne soit observé. « D’autres causes peuvent expliquer que les abeilles soient devenues plus sensibles à ces agents pathogènes, c’est la raison pour laquelle nous étudions les effets combinés de plusieurs de ces facteurs de stress », explique Gilles Salvat, directeur de la santé animale et du bien-être des animaux à l’Anses. L’influence de certains d’entre eux, telles que les ondes électromagnétiques ou la pollution atmosphérique, n’est pas encore bien connue.
35 % de notre alimentation en dépendent
Des spécialistes planchent actuellement sur la procédure permettant d’imposer de nouvelles normes aux sociétés voulant déposer des demandes d’autorisation de mise sur le marché « en prenant en considération les effets des doses très faibles avec une batterie de tests pertinents », explique Gilles Salvat. Un nouveau guide va être édité de manière à mieux apprécier l’impact des produits chimiques sur les abeilles. « C’est un travail de longue haleine car il existe de nombreuses familles de pesticides, mais il faut faire vite, prévient Gilles Salvat. Il y a une certaine urgence pour la santé des abeilles. » Indispensables à l’homme, ce sont elles qui permettent aux plantes de se reproduire, assurant la survie de nombreuses espèces animales. Ainsi, 80 % des espèces à fleurs – plus de 200.000 espèces – dépendent des insectes pollinisateurs. « Il y a 400 légumes qui existent grâce aux abeilles, comme le concombre ou le melon », note Yves Le Conte. La disparition des abeilles aurait un impact énorme et désastreux en termes d’écologie et de production agricole : 80 % de la production des fruits et légumes et 75 % de la production des cultures s’éteindraient. Selon les dernières données de l’Inra, 35 % de la quantité de notre alimentation et 65 % de sa diversité dépendent de la pollinisation par les abeilles. « Il faut soutenir les apiculteurs pour qu’ils ne mettent pas la clé sous la porte, martèle Yves Le Conte. S’ils n’étaient pas là pour recréer des colonies, ce serait catastrophique. »